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aux États-Unis, les blocages d’universités en soutien aux Palestiniens se répandent à travers tout le pays


INFOGRAPHIE – Depuis plus de dix jours, des étudiants militants occupent les campus, notamment à Columbia où le Hamilton Hall a été saccagé dans la nuit. Des centaines d’étudiants ont été arrêtées.

Le blocus propalestinien de l’université de Columbia, à New York, prend une nouvelle dimension. Dans la nuit de lundi à mardi 30 avril, un groupe d’une dizaine de militants a investi le Hamilton Hall. Ce bâtiment universitaire avait déjà été occupé par une manifestation étudiante en 1968 durant la guerre du Vietnam. Sur les réseaux sociaux, des vidéos montrent les jeunes investir les lieux en brisant des portes-fenêtres et en se barricadant à l’aide des meubles.

«Les membres de la communauté de Columbia ont repris Hamilton Hall juste après minuit», a déclaré le groupe étudiant Columbia University Apartheid Divest, dans un communiqué. Ils l’ont renommé «Hind’s Hall» en l’honneur d’une fillette de six ans, Hind, tuée durant la guerre à Gaza. «Prendre le contrôle d’un bâtiment est un petit risque comparé à la résistance quotidienne des Palestiniens à Gaza», poursuit le groupe.

Des manifestants se barricadent à l’intérieur du Hamilton Hall de l’université Columbia, le 30 avril.
Caitlin Ochs / REUTERS

Cela fait maintenant plus de dix jours que des étudiants militants occupent les locaux de la prestigieuse université américaine avec un Campement de solidarité avec Gaza. Un village «illégal» de tentes a été installé sur la pelouse Sud du campus et des manifestations ont été organisées. Les jeunes refusent de quitter les lieux, «sauf par la force» et exigent que Columbia – une université privée – stoppe toutes ses relations avec des mécènes ou entreprises liées à Israël. Joe Biden a critiqué cette occupation mardi, pensant «qu’occuper par la force un bâtiment universitaire est la mauvaise approche» et n’est «pas un exemple de manifestation pacifique». L’université a de son côté menacé de renvoyer les étudiants impliqués.

À l’instar de Columbia, des dizaines d’universités américaines s’embrasent pour demander un cessez-le-feu dans la bande de Gaza. Keffieh sur le visage et peinture rouge sur les mains, les étudiants occupent, depuis plus de dix jours, des établissements aux quatre coins des États-Unis. Plus de six mois après le début du conflit entre le Hamas et Israël, le conflit israélo-palestinien plonge les campus américains dans une impasse. Les chefs d’établissements tentent d’évacuer les jeunes militants qui invoquent la liberté d’expression pour clamer des slogans antisionistes, sinon antisémites.

Usage de la force

Un étudiant juif, qui préfère rester anonyme, a déposé une plainte lundi car Columbia ne parvient pas, selon lui, à fournir «un environnement d’apprentissage sûr», rapporte CNN. L’université de la Ivy League est «devenue un endroit trop dangereux pour les étudiants juifs», a-t-il déploré.

Sous pression, la direction de la prestigieuse université a annoncé des sanctions pour exhorter les 200 occupants à quitter les lieux, après l’échec de cinq jours de négociations pour une solution à l’amiable. «Nous avons commencé à suspendre (administrativement) des étudiants, dans le cadre de cette nouvelle étape pour assurer la sécurité de notre campus», a donc indiqué à la presse lundi soir le vice-président chargé de la communication de Columbia, Ben Chang. Le 18 avril dernier, 100 personnes avaient par ailleurs été interpellées, incitant les étudiants à crier à l’atteinte à la liberté d’expression.

L’usage de la force par la police à Columbia, mais aussi dans les autres manifestations qui se sont répandues partout à travers le pays, fait polémique sur les réseaux sociaux. Une vidéo de CNN montrant des policiers anti-émeutes arrêter des militants avec des menottes en plastique, dans l’université de Caroline du Nord, a notamment fait réagir. Car dans de nombreux cas, la direction des universités fait appel aux forces de l’ordre pour faire évacuer leur campus. Ce fut le cas à Portland, au nord-ouest des États-Unis, où plus d’une cinquantaine de manifestants sont entrés dans une bibliothèque par effraction lundi soir. Sur la côte ouest, dans l’université polytechnique de Californie, à Humboldt, les manifestants se sont eux barricadés dans le Siemens Hall et ont été invités à quitter les lieux par les forces de l’ordre.

Un manifestant propalestinien est arrêté par la police universitaire à l’Université du Texas à Austin, le 29 avril.
SUZANNE CORDEIRO / AFP

350 interpellations

Et les interpellations se multiplient. Rien que depuis ce week-end, plus de 350 personnes ont été arrêtées aux quatre coins du pays et le campement sur le campus de l’université de Boston a été évacué. «Dans le cadre de cette évacuation, environ 100 individus ont été interpellés par la police. Les étudiants qui ont présenté leurs cartes étudiantes ont été libérés (…) Ceux qui ont refusé de prouver leur affiliation ont été arrêtés», a précisé l’établissement sur X en ajoutant que des «insultes antisémites violentes» telles que «tuer des juifs» avaient été proférées sur le campus la nuit dernière.

À l’autre bout du pays, les forces de l’ordre de l’université d’État d’Arizona (ASU) ont «arrêté 69 personnes samedi après l’installation d’un campement non autorisé», a indiqué l’établissement en accusant la «plupart de ne pas être étudiants ou membres du personnel de l’ASU». Ces personnes seront «poursuivies pour intrusion illégale». Et dans le centre des États-Unis, 23 personnes ont été interpellées lorsque la police, munie d’équipements antiémeute, a évacué un campement installé à l’université de l’Indiana, a rapporté le journal Indiana Daily Student.

L’ONU s’est montrée «inquiète» des actions de la police sur les campus. «Je m’inquiète de ce que certaines mesures prises par les forces de l’ordre dans une série d’universités semblent avoir un impact disproportionné», a déclaré le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Volker Türk. Il s’est dit troublé «par une série de mesures musclées prises pour disperser et démanteler les manifestations», soulignant que «la liberté d’expression et le droit de réunion pacifique sont fondamentaux».

Des étudiants propalestiniens manifestent dans un campement sur le campus de l’université Brown à Providence, Rhode Island, le 29 avril.
JOSEPH PREZIOSO / AFP

«Dirigeante très faible»

Ce mouvement de solidarité avec Gaza a éminemment pris une tournure politique, à sept mois de l’élection présidentielle américaine. La candidate du Parti Vert, Jill Stein, a d’ailleurs été interpellée durant l’un des blocus dans l’université de Washington à Saint-Louis, dans le Missouri, samedi dernier. «Nous sommes ici avec les étudiants de WashU, défendant nos droits constitutionnels, défendant le peuple américain qui veut mettre fin à ce génocide maintenant», avait déclaré celle qui était déjà candidate à l’élection présidentielle en 2012 et 2016.

Le camp républicain, lui, s’offusque contre les manifestants propalestiniens. Le chef du parti à la Chambre des représentants, Mike Johnson, a ainsi dénoncé sur X un «campus dépassé par des étudiants antisémites» et appelé la directrice de Columbia, Minouche Shafik à démissionner. «Elle s’est révélée être une dirigeante très faible, elle ne peut même pas garantir la sécurité des étudiants juifs», a expliqué Johnson dans un entretien à la radio, on attend d’eux qu’ils prennent leurs jambes à leur cou et qu’ils restent chez eux pendant les cours».

Le sénateur républicain de l’Arkansas, Tom Cotton, a même demandé au président d’envoyer la garde nationale pour dégager les manifestants, reprenant son appel lancé en 2020 contre les émeutiers qui avaient accompagné les défilés de Black Lives Matter. De leurs côtés, les démocrates cherchent encore la bonne stratégie. Lundi, Joe Biden a appelé les manifestations de soutien à Gaza à rester «pacifiques», tout en condamnant «les propos antisémites». La porte-parole du gouvernement, Karine Jean-Pierre, a rappelé que «la liberté d’expression devait se faire dans le cadre de la loi et du droit».


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